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Maisons & Bois International
N°53 (Juin - Juillet 2003)

DEBAT D’ACTUALITE

Alors que nous consacrons un article dans ce numéro à l’émergence des labels apposés sur le bois garantissant une gestion durable des forêts, le débat surgit dans l’actualité. Le 15 mai, le Rainbow Warrior est entré dans le port de Sète pour inspecter les bois et y apposer les sigles "embargo", "Illégal" ou "crime". Ludovic Frère, chargé de la campagne Forêt déclarait : "Greenpeace dénonce les importations destructrices illégales, ou de grumes issues de conflits, pratiqués en France et demande au gouvernement de prendre des mesures fortes pour faire cesser ces importations et choisir des produits FSC pour ses marchés publics". Il convient de lire entre les lignes l’action de lobbying que tente avec éclat cette ONG, et resituer cette escarmouche dans la concurrence acharnée que se livrent plusieurs marques pour certifier une provenance des bois de forêts gérées durablement. Forest Stewardship Council (FSC), initiée par Greenpeace et le WWF ne représente que 1 % des forêts tropicales, principalement amazoniennes, mais aucune en Afrique. En demandant au gouvernement d’interdire les importations de bois non labellisés FSC, il interdit, de fait, toute importation de bois africain.

Or, même si forestiers et négociants de bois internationaux récoltent les fruits de ces forêts tropicales, il s’agit, pour certains pays, de la seule ressource naturelle disponible, utilisable à des fins commerciaux. Contacté peu de temps auparavant, Ludovic Frère nous déclarait : "On pousse les industriels français à travailler avec de bons exploitants. On fait pression sur les fournisseurs". Mais, en contraignant ces derniers à employer des bois siglés FSC, n’est ce pas renvoyer l’ascenseur en assurant des marchés aux gros groupes industriels qui adhèrent et financent ces organismes pour obtenir leur label ? S’agit-t’il d’un processus démocratique ? Cela va-t’il dans le sens de la survie des populations locales et de la préservation des forêts tropicales pour le bien-être de l’humanité ? Alors que les critères du système FSC fonctionnent sur l’état des écosystèmes et visent directement la déforestation dans une logique d’opposition frontale, les critères du PEFC, plus consensuels, reposent sur des arbitrages, dans une logique de multifonctionnalité et d’autorégulation.

Si ces labels de certifications peuvent devenir de formidables outils pour gérer les forêts du monde, le risque n’est-t’il pas de les voir détournés en vitrine de communication et défense d’intérêts privés ? Du FSC et ses 20 millions d’hectares ou du PEFC et ses 46 millions d’hectares, qui sera le plus à même de nous garantir la pérennité des forêts en prenant en compte les multiples fonctionnalités d’un espace boisé ? Le débat est d’envergure et, une fois n’est pas coutume, offre aux consommateurs le pouvoir de choisir et donc de peser directement sur la gestion durable des forêts.

Christophe Faure

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